Avec
la création de son nouveau spectacle, « Johnny fais moi mâle ! » Virévolte poursuit son
objectif : abolir les frontières entre les styles musicaux grâce à des
programmes où se mêlent chansons, musique pop, rock, jazz, musique baroque et
airs d'opéra. En prenant Johnny comme personnage principal du spectacle, il
s’agira de faire bouger les lignes et de brouiller les cartes, non seulement entre
les genres musicaux mais également entre les genres masculin et féminin.
Car
il s’agit dans « Johnny, fais moi mâle ! » d’affrontement, de combat, de lutte mais aussi de désir.
Qui
s’affronte ? L’homme et la femme. La femme avec elle-même. L’homme avec
son double. La femme avec ses désirs. L’homme avec ses fantasmes, ou l’inverse.
Qui
s’aliène dans un désir jamais satisfait ? Qui suit la femme de sa
vie ? Qui est l’homme de ma vie ? Amusons-nous des tours que nous
joue le désir, découvrons que féminité et virilité sont aussi des mythes et des
fictions, ni territoires homogènes ni frontières étanches. Tenons-nous dans le
passage, à l’intersection des possibles et jouons !
Déguisements,
travestissements et caricatures : dans ce qui s’envoie à la limite rien ne
reste intact, intègre. Rien ne revient plus au même, ni peut-être même…à
l’autre. C’est la contrebande généralisée !
Chansons
pop, airs lyriques ou baroques, revisités et arrangés par Virévolte,
s’enchainent donc pour questionner joyeusement notre rapport au genre et à sa
soi-disant binarité. On voyagera allègrement de Monteverdi (Il Combattimento) à Chuck Berry (Johnny Be Goode) en passant par Mozart (Don Giovanni), Bach (la Passion selon Saint Johnny !),
Vian (Fais moi mal Johnny) et Piaf (Johnny tu n’es pas un ange), avec comme
fil rouge en forme de clin d’œil, ce fameux Johnny, objet/sujet de tant de
fantasmes.
Une scénographie très simple et très mobile nous
permettra de nous produire quasiment partout et notamment dans des lieux non
dédiés au spectacle vivant (prisons, centres hospitaliers, monuments
historiques, musées, etc.) afin d’offrir un spectacle de qualité au plus grand
nombre.
Alors que la société s’interroge sur les rapports
des hommes et des femmes et nous interpelle sur nos rôles et nos identités,
Virévolte a souhaité jeter un regard artistique et musical sur cette question. A l’heure des luttes féministes, des études sur le genre,
des mouvements gays et lesbiens, de la libération de la femme et de l’homme
augmenté, il y a de quoi perdre ses repères ! Loin de vouloir recréer des
frontières à partir de clichés ou d’idées reçues, loin de vouloir refermer des
portes, ce spectacle cherche à explorer ces nouveaux territoires et à voir ce
qu’il y a derrière le miroir et les apparences. La question de l’amour et de la
séduction est centrale mais derrière cette question se cachent les mystères de
l’identité, toujours plurielle, jamais résorbée, jamais unifiée. Les musiciens
sur scène vont donc s’amuser à en emprunter toutes les formes, en se déguisant,
en se travestissant, en jouant à être ce que l’on n’est pas et ce que l’on
voudrait être. Car dans la mise en scène de « Johnny, fais moi mâle ! »,
nous expérimentons aussi la présence des instrumentistes sur scène, intégrés à
l’action et jouant des personnages troublés dans leur genre et dans leurs désirs.
Avec une voix, un violon, un accordéon,
une clarinette, un violoncelle, une guitare et un théorbe, Virévolte propose donc
de traverser un répertoire allant du 16e au 21e siècle.
Les aménagements et les arrangements requis pour un tel exercice offrent aux
auditeurs une écoute nouvelle des morceaux qu’ils connaissent, et leur permet
de découvrir les musiques qu’ils ne connaissent pas. Le pari que nous faisons
est qu’il n’est pas nécessaire de réunir un orchestre symphonique pour jouer
des airs d’opéra, ni d’avoir une guitare électrique ou une batterie pour jouer
Chuck Berry. Nous assumons dès lors que la musique proposée s’éloigne des
habitudes d’écoute et ouvre la voie vers d’autres expériences.
En effet, ce projet est expérimental dans
la mesure où nous essayons sans cesse de nouveaux arrangements : nous
bousculons les idées reçues sur la musique baroque en y insérant de la
clarinette, nous osons le théorbe dans des chansons pop, nous testons la voix
lyrique dans une chanson française, nous nous permettons l’improvisation au
milieu d’un air d’opéra. Le télescopage des différents mondes musicaux crée souvent des surprises et fait
sens. Il va de pair avec le télescopage de nos identités prédéfinies. Les
lignes bougent, nos repères aussi. S’il y a du féminin chez Johnny et du masculin
chez Calamity Jane, quelle sera leur rencontre?